Vacarme 25 / le secret

archives en suspens

Dépositaires des choses passées, nos archives sont la trace de ce qui n’a pas été détruit, de ce qui a échappé à ce silence tombal qui menace tout écrit dont nul ne se serait soucié de la conservation et de la publicité. L’archive est toujours, de cette manière, une rescapée du secret scellé par le temps. Préférer la conservation à la destruction, c’est s’engager, et engager les générations qui viennent, quant au partage entre le secret et le public.

Un engagement, donc, pour la sauvegarde des archives comme service public. C’est le sens de la fondation récente de l’Association des Usagers pour le Service Public des Archives Nationales (AUSPAN), née en février 2003 d’une réaction de lecteurs, universitaires, généalogistes, tous « usagers » des archives, et confrontés aux impérities et au corporatisme qui étouffent les Archives nationales. La « politique des archives » tient tout entière dans les dif-ficultés concrètes de leur usage : non-publication de certains inventaires, difficulté d’accès à d’autres inventaires, annonce anticipée de l’existence de fonds archivistiques, dossiers non répertoriés… Les Archives nationales se sont mues au fil des ans en un lourd édifice « de faveurs, de petits arrangements et de féodalités imprenables [1] », forteresse qui décourage aujourd’hui le travail de l’historien, et laisse sans bruit le passé rejoindre le silence.

Être usager de son propre passé : nous avons voulu porter l’écho de cette exigence formulée aujourd’hui par l’AUSPAN, en accueillant les réflexions de Sébastien Laurent sur les rapports, en France, du droit et des archives [2], mais aussi en revenant auprès de Brigitte Lainé, archiviste qui, parfois même contre son administration, a su faire de son métier un engagement.

Notes

[1Association des usagers pour le service public des archives nationales (AUSPAN), « Délits d’initiés » auspan2003@yahoo.fr

[2Sébastien Laurent (dir.), Archives « secrètes », secrets d’archives ? L’historien et l’archiviste face aux archives sensibles, CNRS-éditions, 2003.