7 jours bruitistes aux Buttes Chaumont

Septième jour, dans le métro : dimanche

par

Lorsque s’est produit le moment d’écoute que je vais raconter à présent, je n’avais rien pour enregistrer. Il n’était d’ailleurs pas 18 heures et j’ai été pris au dépourvu. Mais c’est cette vertu de surprise qui me semble la plus importante ici. Rien n’a été enregistré. Alors que j’étais assis dans une rame de la ligne 7, quelque part au-dessus de Louis Blanc, un son de basse continue, très pur, se fait entendre, tandis que s’y superposent deux notes plus aiguës mais proches et mal définies, comme situées trois octaves au-dessus. J’avais tout à coup le sentiment de me retrouver au milieu d’une bulle sonore semblable à celle qu’Earth Horns avait produite la veille. Cet accord rudimentaire avait quelque chose d’hypnotique : non par sa qualité sonore particulière, mais parce que j’avais le sentiment d’être le seul à l’entendre et qu’il donnait soudain consistance à l’espace commun du métro. L’accord me déliait de mon trajet et de mes obligations ; il m’invitait à rester assis indéfiniment, pour écouter le chant neutre de la voiture sur le métal des rails et sa voix de muezzin désincarnée. Mal construit, dissonant et fragile, rien ne semblait capable d’y mettre un terme.