7 jours au Caire

18 novembre 2013

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Le taxi démarre. Nous quittons l’aéroport en direction du centre-ville du Caire. L’air tiède de la soirée s’engouffre par la fenêtre. Le chauffeur me tend une de ses Cléopâtra, sortie de son paquet mou, ces cigarettes brunes qui ajoutent à la brûlure de la gorge déjà irritée par la familière pollution de la ville. Effluves de pots d’échappement et poussière du désert. Nous discutons tranquillement, et l’arabe oublié refait surface. Il me demande d’où je viens. Allemagne ? Italie ? Je viens de France. A7san nas, dit-il. Ce qui signifie « le meilleur peuple ». « Tu es mariée ? » Je réfléchis rapidement à l’histoire que je vais inventer. Oui je suis mariée. « Ton mari est avec toi ? » Il va me rejoindre. On entre dans Heliopolis, quartier chic aux abords de l’aéroport. « Tu vas où ? » Chez des amis, ils m’attendent. Et, non, je ne suis pas seule.

Vue nocturne du palais du Baron Empain

La voiture zigzague entre les voies de l’autoroute. Je me cramponne à ma ceinture. On double un camion par la droite et on évite de justesse une moto sur laquelle s’entassent quatre personnes. Puis, c’est l’inévitable embouteillage. Nous nous observons tous de voiture à voiture. Une jeune femme très maquillée. Elle pianote avec ses ongles manucurés sur son smartphone. Un couple sur une mobylette. La femme est enveloppée dans son niqab et elle est assise en amazone : pour ne pas être indécente. Elle s’accroche à son mari pour ne pas tomber… Et aussi, une camionnette remplie de moutons. Nous repartons.

« Tu penses quoi de la situation politique ici ? » me demande le chauffeur. « Et toi ? » La silhouette baroque du palais du Baron Empain surgit. Étrange verrue architecturale d’inspiration khmer dans les lotissements de ce quartier. « Je pense qu’il faut un homme fort pour ce pays. » « Sissi ? » je demande. « Par exemple. Les autres ils veulent faire la révolution mais nous on veut manger, tu comprends. » Sissi, c’est l’omniprésent maréchal Abdel Fattah Sissi, le nouveau maître du Conseil Suprême des Forces Armées. Son nom est sur toutes les lèvres depuis juillet. La voie rapide descend en pente douce. Nous arrivons derrière le Musée égyptien, sur la place Tahrir.

Aujourd’hui, l’armée a érigé un monument aux morts au beau milieu de cette place où le gazon a repoussé, où des fleurs ont été plantées et les trottoirs reconstruits. Plus de plage sous les pavés.