à propos du « Gone de Chaaba »
par Karelle Guy
Il était sûr d’une chose en refermant le livre d’Azouz Begag, Le Gone du Chaaba, (Seuil) ; il passerait le restant de sa vie s’il le fallait à en réaliser l’adaptation cinématographique. Christophe Ruggia ne s’était pas trompé. Il a juste mis un peu moins de temps que prévu : deux ans. Son film, du même titre, sort le 14 janvier.
Et le gone, en patois lyonnais, c’est le gosse. Ce petit bout de garçon, né en France de parents algériens, qui nous raconte à la première personne sa vie dans un bidonville. Un de ces lieux gracieusement offerts aux familles algériennes appelées en renfort de main d’œuvre. Des façades de bois, des planches où les voix résonnent. Des femmes qui se battent, se soutiennent. Des hommes qui se lèvent trop tôt pour être là. Et des enfants qui en ont marre des discriminations de l’école républicaine. Qui animent le chaaba de leurs jeux et de leurs rêves. Comme celui d’Azouz qui ne vit que dans les pages des livres. C’est un film d’une beauté étonnante où les visages à eux seuls sont une histoire. Christophe Ruggia nous parle de ces vies-là avec sincérité et esthétique. C’est un film rare, d’une actualité à laquelle Christophe ne s’attendait peut-être pas, dont il ne faut pas se passer.