musiques en mode mineur avant-propos

Production artistique avant tout, la musique nous parle de nous, de notre société. Par sa production, sa diffusion, son enseignement, les réactions qu’elle suscite et par toutes les intentions et les discours qui l’accompagnent, la musique agit et essaye de rendre la vie supportable au plus grand nombre. en cela, elle rencontre la politique. Ce feuilleton essaie de se situer au point de rencontre entre musique et politique, en évitant que l’une soit seulement un prétexte pour parler de l’autre. La musique accompagne notre vie, et cette seule raison suffit à vouloir en parler, entendre parler ceux qui la font, ou savoir comment elle nous parvient.

Akiyo et les Fabulous Trobadors s’inscrivent dans une tradition qu’ils reprennent et réinventent, refusant de s’y laisser enfermer : la tradition des troubadours occitans dans le cas des Fabulous, les traditions du tambour et du carnaval dans le cas d’Akiyo. Akiyo est un « mouvement culturel » qui revalorise tous les aspects de la culture guadeloupéenne, et essaye de pousser les gens à inventer : les Faboulous animent leur quartier de Toulouse (Arnaud Bernard), essayent d’y implanter la démocratie avec des débats socratiques ou des repas de quartier, et dont un forum de toutes les langues du monde.

La montée des groupes de musique « territoriale » (ou régionale) reflète la pluralité des cultures, y compris dans la france républicaine. Ces groupes s’opposent à la norme de l’humanisme universaliste français. Les Fabulous Trobadors défendent la langue occitane qui se meurt, faute de locuteurs. Akiyo défend la culture qui finissait par être auto-dénigrée par les guadeloupéens, quelques siècles d’exclavagisme et de colonialisme aidant.

Cette position minoritaire, y compris dans leur territoire, les différencie peut-être des musiciens bretons ou corses. Tout le monde en Corse fait de la polyphonie corse. Hervé le Lu, le sonneur du groupe breton Carré Manchot, voit dans les mots « musique bretonne », un refus de reconnaissance de l’universalité de sa musique. « Vu de Paris, ça vous paraît étonnant, mais chez nous, nous sommes dans la norme ». Carré Manchot anime cent vingt Festou-Noz par an, devant des publics allant de mille à sept mille personnes. Ils sont majoritaires en nombre et font partie de la norme (bretonne). Peut-être étions-nous donc victimes d’un effet de position en les rapportant à un centre (Paris, l’État français, la musique pop) qui selon eux, ne les concernait pas ? Mais on comprendrait mal les entretiens avec Akiyo et les Fabulous Trobadors s’ils ne considéraient pas eux-même cette norme comme existante et étouffante.