avant-propos

Face à la faiblesse de la participation politique, à un désenchantement et une « dépolitisation » dont le constat est devenu consensuel, la démocratie locale est apparue dans les années 1990 comme une tentative de réponse. Entendue comme la participation des citoyens aux décisions prises au niveau local, cette démocratie-là est avant tout une pratique. Une pratique non sans ambiguïté. Au nom d’une plus grande accessibilité des questions qu’elle engage, elle tend souvent à rabattre la participation démocratique sur la défense d’intérêts locaux, voire individuels. Elle se présente même à l’occasion comme une nouvelle manière de faire entendre sa voix sans se préoccuper des enjeux politiques. Elle fait figure de leurre lorsqu’elle donne un droit de parole aux citoyens, moins pour changer les procédures de décision que pour gagner leur accord en leur donnant l’impression qu’ils ont pu s’exprimer. Entre stratégie de communication et fausse concertation, la démocratie locale n’échappe pas toujours à la caricature.

Reste qu’elle a aussi quelque chose de vivifiant, lorsqu’elle conduit par exemple à prendre position, collectivement, face à l’aménagement d’un quartier. Renouer la parole entre voisins, alors même que l’espace privé se replie frileusement sur lui-même, défendre une conception de la vie en commun qui se traduise dans les bâtiments, autant de petits signes d’une générosité un peu rare dans une capitale qui accélère son embourgeoisement. Deviner aussi les bribes de ce qu’une telle forme d’action soulève : ce n’est plus seulement l’aménagement du quartier qui est en jeu, mais sa vie et ses réseaux d’activités. S’il est vrai que la politique commence aussi toujours en bas de chez soi, on ne peut s’empêcher de guetter dans la démocratie locale un sursaut contre l’apathie politique.