Vacarme 11
printemps 2000

À nos lectrices et lecteurs
Ce numéro, Vacarme 11 (printemps 2000), est désormais archivé et tous ses articles sont accessibles dans leur intégralité. Vacarme aime la gratuité, mais une revue existe grâce à ces abonné·es.
chroniques
Mes rêves entraînent des cataclysmes
par Eric Vuillard
Il n’est à présent plus douteux qu’une partie non négligeable de l’univers est déjà sur le point de s’être ordonnée selon une logique nouvelle : ma rate en lieu et place de telle planète et les anneaux de mes viscères formant en bourrelet un cône siliceux traversant une partie de la galaxie concernée... Je n’expliquerai pas encore l’origine des étoiles filantes, mais je dirai deux mots à propos des comètes. Il s’agit d’expectorations que j’ai eues, malade il y a longtemps. Désormais guéri, certaines circulent (...) Lire →
Romorantin vs La Roche-sur-Yon
par Fred Poulet
Manchester United est au Brésil. Le champion d’Europe a refusé de s’engager dans la cup, la mythique coupe d’Angleterre, doyenne des compétitions de football, pour aller jouer la première coupe du monde des clubs. Il s’agit d’une compétition totalement dénuée de crédibilité, mais organisée par la fédération internationale qui attribue par ailleurs l’organisation des compétitions internationales aux pays candidats. L’Angleterre est sur les rangs pour la coupe du monde 2006 et Tony Blair en fait une affaire (...) Lire →
Recette. Un menu pour goûter sereinement le temps qui passe
par Michel Celse
Comme toute une chacune, dans votre jeune temps, vous calculiez l’âge que vous auriez en l’an 2000, cet horizon qui vous paraissait, comme tout horizon qui se respecte, indéfiniment lointain.
À quinze ans, mais aussi bien à vingt-cinq encore, vous vous disiez confusément que d’ici là vous seriez, par exemple, devenu adulte, ou encore que vous auriez trouvé l’homme de votre vie — ce dont vous n’êtes pas loin de penser, dans vos moments d’égarement affectif, que cela revient au même. Or voilà, c’est fait (...)
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De prime abord ailleurs ensuite
par Jérôme Mauche
Il y a quelque temps déjà alors qu’il était facile de se rendre ici ou là justement forcément plutôt ailleurs qu’ici, non précisément ailleurs quelque part sous un nom mais ailleurs en soi, on a constaté d’expérience que précisément personne à ce que je sache ne tentait d’aller au-delà, au loin déjà, ailleurs en tout cas, par exemple d’y aller, de s’y rendre, de continuer, de voir venir aussi comment comment (surtout moi le premier d’entre).
Non pour critiquer ce que chacun fait ou ne pratique pas comme (...)
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Le visage de Laughton
par Pierre Alferi
Si c’était un portrait, il ne serait pas chinois mais nippon. Une estampe tamponnée sur une autre, geisha plaquée sous gras sumotori, elle impassible, lui grimaçant. Qu’aimait-il dans l’art japonais ?
Difficile d’arracher Charles Laughton à la grande filière théâtrale dont les transfuges au cinéma cabotinent, en font juste assez trop pour qu’on s’exclame. En outre, il est un monstre, force ou erreur de la nature, spécialiste des juges et bourreaux, bossus et Barbe-Bleue, bêtes humaines, tyrans, spectres, (...)
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l’invention de la seiche
par Ariane Chottin-Burger
à N.T.
La seiche est un mollusque, un être divisé, en elle le dur se sépare du mou. Lointaine parente de l’escargot, elle porte, comme lui, sa coquille sur son dos. Son os d’un blanc de craie, dont les oiseaux raffolent pour s’affûter le bec, imprime une forme ovale au manteau rayé qui la couvre et retombe en nageoires. Le frémissement constant de cet ourlet mobile la propulse dans l’eau salée, silencieuse, le long d’une trajectoire horizontale qui l’éloigne peu des côtes, frôle les tombants rocheux (...)
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Boîte cranienne
par Jean-Marie Bretagne
J’ai fait la saison dans cette boîte crânienne(Alain Bashung) Il eut envie de se trancher les veines, pour se rafraîchir un peu(August Strindberg)
à Agnès et Eric Dessuant et pour Nathalie Dagron
Nous habitions, mes parents et moi, une maison si claire qu’elle ne semblait cacher aucun secret. Cet environnement limpide fit de moi, très tôt, l’ennemi des malentendus, faux semblants et autres jugements vagues. À l’école, lorsque le professeur ramassait les copies, il m’arrivait fréquemment de déchirer la (...)
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Le chemin, c’est chaque os
par Didier Doumergue
Tentative de description d’une photo de ma sœur et de moi. Elle a cinq ans et j’en ai trois. On ne voit sur le fond noir de la forêt que son sourire et ses yeux ronds, mon front sérieux de garçonnet et le destin qui nous guette en forme de nuée blanche.
Depuis l’été mille neuf cent cinquante-cinq, je fais un rêve épuisant dont je ne me réveille pas. Ma sœur est âgée de cinq ans, je n’en ai que trois. Elle me conduit sur le dos d’un rocher, nous allons vers la mort, à deux pas, rien ne presse. Nous avançons (...)
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