Vacarme 21
automne 2002

À nos lectrices et lecteurs
Ce numéro, Vacarme 21 (automne 2002), est désormais archivé et tous ses articles sont accessibles dans leur intégralité. Vacarme aime la gratuité, mais une revue existe grâce à ces abonné·es.
Chroniques
Un ermite frivole
par François Rosset
Où son âme présente un défaut cardinal : il avoue à demi-mot mal se porter lorsque en réalité il ne ressent rien – que ce soit envers son travail, ceux qui l’entourent, ou s’il constate la vacance de ces désirs qui d’ordinaire le taraudent (ceux-là, en grande part, sont très hauts). Au lieu d’admettre la platitude de cette neutralité atroce – de cette désactivation intérieure dont n’importe quel être souffre de façon récurrente – il fait ses allusions avec une voix basse qui laisse accroire que oui, il (...) Lire →
Une sérénade
par Suzanne Doppelt
Pour des raisons de mise en page, cette contribution est uniquement disponible en pdf. Lire →
bernique, journal d’une anosmie
par Jean-Pierre Guillard
En novembre 1998, Jean-Pierre Guillard a reçu un coup sur la tête. Il en a perdu le goût et l’odorat.
troisième semaine
J’ai le sentiment de me plier à la cérémonie de la tisane depuis une éternité.
Ça fait trois semaines que l’odorat a disparu. Et trois semaines que, chaque jour, Elia m’apporte le gros bol du remède fumant qu’elle a dégoté chez un marchand d’anxiété alimentaire.
Je m’y plie, je m’y replie et ainsi de suite jusqu’à disparaître dans mon sans goût brûlant.
quatrième semaine
Cette année, à (...)
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paris, 15 août
par Pierre Alferi
L’audace impudente, la fraude et la médiocrité règneront toujours, c’est leur sort de revenir sur l’eau.
Les rues les moins fréquentées des grandes villes seront éclairées la nuit mieux qu’elles ne sont en ce moment, et elles seront tout aussi sûres. Parfois les principales rues des petites villes jouiront des mêmes avantages. Telles sont les douceurs et la bienheureuse destinée que le ciel réserve à la génération qui s’élève. Heureux ceux que, au moment où j’écris, la sage-femme reçoit vagissants dans ses (...)
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une désaffection pour la chose sportive
par Fred Poulet
Régurgiter par associations Délier une histoire Que tel vide amène à tel plein Libéré du convaincre énumérer les indices Il y a des montagnes Leur cime est enneigée Boucles échantillons qui s’altèrent Pour délier les pleins La boucler pour qu’elles s’ouvrent, suggèrent la proximité d’une mer Arracher un épaulé jeté L’haltérophile soulève de la fonte Comme neige au soleil
Jamais je n’aurai mis aussi longtemps pour écrire cette chronique. Il est difficile et fort ennuyeux d’exprimer sa désaffection. En l’occurrence (...)
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Rébus
par Victoire Patouillard
western love
par Bill Luoma
J’ai apprécié ton plat de haricots. C’était grand comme dix amarantes. Tu as aussi acheté des couvertures à la mode pour nous protéger des cris du coyote dans la nuit. Je t’appelais mon petit coussin isolant.
La prairie s’étend à perte de vue au fil de notre errance. Tu as fait un feu pour sécher nos chaussettes. Dans la nuit les bêtes reconnaissantes clignaient des yeux vers les ombres. Les collines se délitaient.
Ton instinct de cheval t’a préservé des concessions minières. Tu as trouvé des pépites (...)
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l’épeire / plus qu’une enveloppe vide
par Ariane Chottin-Burger
Le cadre de la fenêtre a disparu. Son ombre a filé plus loin, en contrebas de la colline — la vue est grand ouverte et il ne me reste qu’un seul vœu, faire ce que je ne sais pas. Sur le figuier, contre le mur, une épeire allonge ses pattes avec lenteur. Elle évalue un vide puis s’élance, sans tomber. J’étais surprise — vous aussi sans doute, la surprise vous atteint de cette façon. Elle tire le lacet qui maintient ensemble les sourcils au-dessus des yeux. Une fois faite, l’ouverture se creuse. Le regard (...) Lire →
si possible dormir en blanc
par Frédérique Ildefonse
Du balcon, maintenant, on a la perspective des femmes, dans la trouée. Les animaux sont accumulés, lavés. Ils font passer les animaux ; il y a une chaîne, des répliques. Ceux qui viennent de dehors restent sur le côté. Après la fête, pieds nus, on traverse le long du sable, l’enfilade des voitures. Plus tard, on lavera les vitres et le sol de l’autel. Une tête cachée par une sorte de paille, recouvre le visage. La zone est composée de maisons basses, il y a des couleurs ; certains arbres sont (...) Lire →
mettons
par Ingeborg Bachmann
mettons
Mettons que je ne sais plus pourquoi je vis ici, puisque j’écris sur Vienne - ou plutôt, quand j’écris, je suis à Vienne. Et mettons qu’ici je ne bois ni café au lait, ni grand crème, ni Kapuziner, mais un capuccino, et les loyers sont chers, mais on mange pour beaucoup moins, et soudain tous les amis s’appellent Giulio ou Giorgio ou Luciano, Ginevra, Marina, Alda. Mettons qu’on rêve déjà dans une autre langue, mais il paraît que ça ne veut rien dire : il faut savoir compter dans une autre (...)
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« aux grèves des mineurs »
par Anne-Françoise Brillot
Photographies et textes extraits d’un monument réalisé par Anne-Françoise Brillot [Agence Paysage(s)] pour La Maison de l’Art et de la Communication, à Sallaumines dans le Nord-Pas- de-Calais. Panneau en acier brut de deux mètres de hauteur, sur chaque face sont installés 35 carreaux de faïence blancs imprimés avec des paysages. Traces physiques de ces histoires englouties sous terre. Morceaux choisis d’entretiens avec d’anciens mineurs sur leurs souvenirs de grèves.
« Mon père mineur, qui était (...)
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deux récits
par Nina Volkova
les abîmes
psychée
À tout lieu de vie correspond un plan, sont attribués des points cardinaux. Tout est si souvent vu d’en haut, en trois dimensions sur un écran ou retranscrit en signes conventionnels sur le papier. On se tient au bord de la carte géographique, on connaît la source des fleuves et l’endroit où ils se jettent. Derrière soi, on aura l’Inde, devant, la Laponie. La Lapone, puis la Finnoise — n’est-ce pas ici que la Reine des Neiges a emmené le garçon gelé ? Une ville ordonnée avec logique (...)
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