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politique des usages un séminaire au collège de philosophie

Du 13 novembre au 29 janvier, Mathieu Potte-Bonneville coordonne un séminaire au Collège de Philosophie, dont l’hypothèse est la suivante : on gagnerait à penser (et à faire) la politique sous la notion d’usage. Une piste ouverte dans Vacarme il y a quelques années, précisée dans un premier séminaire l’an dernier, prolongée cette année.

« Omniprésentes dans le débat politique, des notions telles que l’utilité, l’utilisation, l’usage ou les usages voient leur élucidation trop souvent réduite soit à une dénonciation des manœuvres manipulatrices, soit à une invocation abstraite du bien commun. Or, penser la politique en termes d’usage implique d’autres alternatives, que résume bien mal l’opposition traditionnelle entre « servir » et « se servir ». Après avoir consacré le séminaire 2007-2008 aux « théories de la pratique » susceptible de donner consistance à la figure de l’usager, comme position depuis laquelle la politique apparaît sous une lumière nouvelle, on s’intéressera cette année aux dilemmes que soulève la notion d’usage, lorsqu’on l’emploie pour désigner le mode d’intervention des individus dans l’espace public. En particulier, on examinera quatre jeux d’oppositions qui nous semblent conférer à l’espace des usages sa consistance spécifique : 1/ opposition des modèles, l’usage étant renvoyé tantôt du côté de l’outil et tantôt du côté du signe, situant l’activité politique à l’intersection des rationalités instrumentale et symbolique ; 2/ opposition des horizons, l’usage trouvant son vis-à-vis tantôt dans une nature dont il s’agit d’exploiter les ressources, et tantôt dans des institutions dont il s’agit d’explorer les potentialités – la question étant alors celle des limites que l’action rencontre et doit s’imposer dans ces deux ordres ; 3/ opposition des temporalités, la réflexion sur l’usage valorisant ici le souci de l’occasion et de l’opportunité, là la sédimentation des habitudes et la nécessité de tenir compte des conventions usuelles ; 4/ opposition enfin des subjectivités, l’acteur de l’usage étant tantôt considéré comme celui qui s’excepte de la règle générale, et tantôt comme celui qui invente avec d’autres des pratiques coopératives, l’usage se déployant alors comme l’expression d’une puissance commune.

Ces diverses polarités devraient permettre, cette année, d’instruire la question des usages en politique à deux niveaux complémentaires : d’une part, en relisant autrement quelques références classiques du corpus philosophique (de Machiavel à Arendt) ; d’autre part, en examinant transversalement plusieurs débats contemporains qui réactivent telle ou telle de ces tensions (de la « politique du performatif » défendue par Judith Butler à la « tragédie des communs » thématisée par Hamilton dans le cadre d’une réflexion politique sur l’usage de la nature).

Plusieurs chercheurs ont cette année répondu à l’invitation de ce séminaire et je les en remercie : ces séances partagées seront l’occasion de revenir sur leurs travaux, et d’explorer ensemble croisements et divergences sur le fond de questions aujourd’hui collectivement débattues. » (Mathieu Potte-Bonneville)

Le programme du séminaire :

Quelques textes, dans Vacarme et autour, consacrés aux notions d’usage et d’usager :