Vacarme 08
printemps 1999

À nos lectrices et lecteurs
Ce numéro, Vacarme 08 (printemps 1999), est désormais archivé et tous ses articles sont accessibles dans leur intégralité. Vacarme aime la gratuité, mais une revue existe grâce à ces abonné·es.
chroniques
magie corse
par Suzanne Doppelt
pour Avital
24 octobre à coup d’asphodèles ou de tibias humains, du 31 juillet au 1er août, les mazzeri des alentours se livrent bataille, en rêve. Des plantes, restent des squelettes bruns et secs, plus le visage solarisé du mort futur.
27 octobre des dizaines de km quasi improvisés : blanche ou noire — comme les toits de quelques sépultures — n’y a-t-il de magie que dans les livres ?
29 octobre par crainte des esprits et pour mourir réconciliés, certains bandits — pourtant, non perdona mai ne (...)
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l’outil
par François Rosset
J’ai vu Priape au sortir des arsenaux où il travaille, esseulé comme on l’est après tant d’heures passées dans le bruit, la lueur des soudures. Tous les quatre pas il heurtait le mur de son épaule droite renfrognée, trouvant ainsi le moyen de rebondir malgré ses jambes gourdes. Comme je m’écartais pour lui céder le passage, il me dévisagea avec le reste d’acuité que l’épuisement lui concédait. Racine soulevant le cuir huileux du tablier, sa verge était apparente. Pour cette raison, j’ai fait une remarque à (...) Lire →
le point sur le championnat
par Fred Poulet
1 — Bordeaux. 52 points. Bleu marine à scapulaire blanc. Ce marine profond qui évoque autant le sombre bleuté qui nuance les vins tanniques de la région que le proche océan. Le centre d’entraînement du château du Haillan élabore un cru nerveux, stable, très charpenté, à l’image de son avant-centre Lilian Laslande. — Non, pas le château. L’entraîneur Élie Baup pratique avec aplomb une langue du bois dont on fait les meilleurs fûts.
2 — Marseille. 51 points. Blanc à parements bleu ciel, représentation (...)
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au point de tige
par Sylvie Nayral
Semaine de vacances nocturnes, les pâles lueurs de l’aube et un soir, une nuit, sous un ciel du Greco, marche à pied. Son du galop des petites filles sur l’ellipse en terre battue, au stade où nous en étions. Encore marcher au présent : creusant cette lumière de nuit approcher la nature des cônes et des bâtonnets qui structurent le fond de la vision. La description du paradis et au retour aussi, face aux pléiades soulignées par le mouvement des nuages, s’entrelaçait lentement à l’affinement des (...) Lire →
la ville
par Jean-Luc Nancy
La ville ouvre l’espace d’une liberté qui cependant ne se mesure pas en termes d’autonomie ni d’indépendance. Elle est un monde d’émancipation, mais il n’est pas réglé sur le modèle accompli d’une citoyenneté ni d’une civilité. L’urbanité est plus subtile et plus délicate, plus difficile et plus opaque. En ce sens, l’ethos de la ville n’est pas un ethos politique. Il est plus ou moins que cela, il est d’une autre espèce, plus policée et moins policière, plus affranchie et moins souveraine. L’« énergie de la rue (...) Lire →
un menu pour savoir bien en finir
par Michel Celse
Pour inaugurer l’année, vous aviez donné une splendide fête car tout allait pour le mieux et qu’il faut jouir sans différer de ces moments-là, sachant bien qu’on ne peut trop compter qu’ils durent toujours. Bien vous en prit, car depuis lors la belle histoire d’amour qui, entre autres, nourrissait votre bonne humeur, a tourné à la manière d’une mayonnaise sournoise qui monte et monte encore, bien fermement, et attend l’ultime goutte d’huile que vous lui ajoutez afin d’atteindre sa plénitude pour (...) Lire →
la girafe du Roi
par Ariane Chottin-Burger
Connaissez-vous l’histoire de la première girafe qui posa le pied sur le sol français ? En 1826, le vice-roi d’Égypte, Méhèmet Ali, décida de faire présent au Roi de France, Charles X, d’un gracieux girafon femelle... L’arrivée d’un quadrupède aussi mal connu suscita un tel émoi que le pays tout entier vécut à l’heur des péripéties de la belle étrangère pendant près d’un an.
Tout débuta en 1825, lorsque Berbardino Drovetti, zélé consul de France au Caire, reçut une circulaire du Ministère des Affaires Étrangères (...)
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porcelaine et volcan
par Frédérique Ildefonse
cela m’a menée sur une balançoire (je vous permets d’en rire)
puis il dormait et je ne savais pas si je devais bouger
-- le temps passait, et même moi, sans m’endormir, je m’envolai
(il me pousse un cœur que je planterai dans un pot de fleurs, avec toutes les précautions) (dehors, il y a une guerre intestine, une querelle entre le valet de carreau et la dame de trèfle)
on dit parfois que les rêves composent une seconde vie que nous pouvons rejoindre chaque soir sur un petit radeau
par exemple, (...)
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L’art de la radiographie
par Salvatore Puglia
La technique de la radiographie et les images symboliques qui y sont liées ont à plusieurs reprises intéressé les artistes de ce siècle.
Dans le domaine médical, la diffusion de la radiographie fut extrêmement rapide. Elle débuta en décembre 1895, lorsque le docteur Röntgen montra à ses collègues allemands une image de la main de sa femme, dont les os étaient visibles, et où sa bague apparaissait comme une forme noire (1). Cette image, porteuse d’une rare aura, ne peut pas ne pas avoir influencé les (...)
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le sillon de Talbert ou un brouillard infernal
par Christine Desrousseaux
Il n’y avait pas un jour où elle n’y allait pas. Même les jours de tempête ? Oui, même ceux-là, même quand les vagues risquaient de l’emporter. Souvent, elle arrivait vers seize heures trente, après les cours. Elle le parcourait de bout en bout. À marée haute comme à marée basse. Trois kilomètres de galets entre ciel et mer. Elle marchait toujours du même pas décidé, comme si elle avait rendez-vous de l’autre côté.
Le géologue ajusta son appareil et prit une photo. Devant nous, le sillon de Talbert (...)
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