L’homme décidé entretien avec Jacques-Alain Miller
C’est peu de le dire : la psychanalyse, politiquement, ça crispe. Surtout celle de Lacan : voir le dernier livre de Didier Eribon, qui le conteste sur la question des minorités sexuelles [1]. Surtout le Lacan de Jacques-Alain Miller – héritier contesté. Mais justement : il se pourrait fort que ce qui se passe en ce moment du côté de cette psychanalyse-là – disons, un appel au public, à un moment où le statut des psychanalystes est sur le point d’être réglementé – contribue à un dégel. Mieux vaut en tout cas une bataille vive qu’un front enterré. En attendant un chantier plus vaste, introduction à un mouvement naissant, par ses parties prenantes.
De l’Argentine à la France, la construction d’un champ
« Ai-je vraiment eu à choisir il y a vingt ans, entre deux voies ? Rétrospectivement, je ne le crois pas. C’était un choix forcé. Lacan avait été porté au pinacle après la sortie des Écrits, puis, dans la foulée de 68, il passait pour l’un des inspirateurs de la jeunesse révoltée. Mais par la suite son enseignement est entré en contradiction avec certaines des tendances du mouvement, avec le « sexo-gauchisme » . Il rappelait qu’il y a des limites à la jouissance, qui ne tiennent pas à des interdits sociaux, qui sont des limites internes. Il soulignait que le désir n’est comme tel promis à aucune libération, parce qu’il est l’envers de l’interdit, son équivalent sous une forme inversée. Il ne croyait pas au progrès, mais que tout progrès se paye d’un retrait, d’une régression, sur d’autres points, etc. Ce n’était pas dit dans l’esprit d’attrister la jeunesse. Lacan n’a jamais été un vendeur de tristesse. Il essayait au contraire de mettre le savoir du psychanalyste au service d’une révolte sympathique, mais vouée à succomber à ses impasses. Cet appel à la lucidité a rallié une partie de l’opinion remuante, qui s’est retrouvée dans l’École freudienne, mais en a irrité une autre, qui s’est écartée. Cette division s’est également marqué dans les distances qu’ont prises alors avec Lacan les philosophes qui avaient été parfois ses promoteurs au cours des années précédentes, et qui étaient ses cadets : Foucault, Deleuze. Le livre de Deleuze et Guattari, L’Anti-Œdipe, est le mémorial de ce moment. C’est allé de mal en pis durant les années 70, jusqu’à ce que les contradictions internes de l’École freudienne de Paris s’aiguisent, et que Lacan décide de dissoudre son École dans des circonstances dramatiques. Là, j’ai senti, presque physiquement, les portes se fermer, les oreilles se clore. Quelqu’un que j’aimais beaucoup, que tout le monde aimait beaucoup, François Chatelet, le philosophe, qui présidait le Département de philosophie de Paris VIII, qui était celui qui faisait le travail pour tout le monde, qui soutenait le Département de psychanalyse, qui connaissait Lacan personnellement… je me souviens de François Chatelet me disant peu après la dissolution de l’École freudienne : « Comme nous sommes déçus. » Et qui était ce « nous » ? C’était l’opinion intellectuelle, qui ne comprenait pas cette dissolution, qui reprochait à Lacan de l’avoir décidée seul, en autocrate, et qui m’en voulait sans doute à moi aussi de rester à ses côtés. Quant à l’opinion en général, elle prenait sa revanche sur un maître qui l’avait longtemps subjuguée. Je sentais l’étau se resserrer progressivement. Là, j’ai fait un choix, le seul qui était raisonnable. Le choix était de ne pas m’épuiser dans des escarmouches, à remonter le courant d’opinion. Il fallait mettre tout son courage à laisser ce terrain, à ne pas mot dire, et à se déplacer pour construire un espace autonome où l’enseignement de Lacan trouverait une traduction pratique dans la psychanalyse. Le vrai problème n’était pas l’opinion, mais l’IPA, dont je voyais bien qu’elle serait disposée à absorber très vite Lacan, mais un Lacan dévitalisé, aseptisé. Lacan mort, l’IPA était tout à fait prête à révérer le penseur, le lecteur de Freud, l’éminent rhétoricien, mais en le séparant de sa pratique. Le châtrer, et puis présenter la momie Lacan à côté des autres, comme on voit dans Tintin et les cigares du pharaon. Vous auriez eu dans l’enfilade : « Jacques Lacan, psychanalyste » . La décision du Champ freudien a été de poser : Lacan est un bloc, nous prenons tout, l’enseignement de Lacan est inséparable de sa pratique. »
Détour par Koutousov
« Dès 1981, peu après la mort de Lacan, je me suis rendu pour la première fois à Buenos Aires, qui est une des capitales de la psychanalyse internationale. Horacio Etchegoyen, qui était alors le dirigeant de l’une des deux associations de l’International psychoanalytical association (IPA) dans cette ville, s’est aussitôt présenté à moi, et voulait m’inviter à faire des cours. Donc, à l’arrivée, j’ai tout de suite eu la sensation que je me déplaçais dans un univers qui n’était pas distribué comme le nôtre. Il y avait déjà beaucoup de praticiens qui étudiaient Lacan, et des gens pour les enseigner, qui recevaient pour des cours privés des psychanalystes de l’IPA. Cette semaine d’octobre 81 a été cruciale : fallait-il céder à cette offre charmante ? J’en avais l’envie, mais je me suis dit que non, je n’enseignerai pas à l’IPA, que je construirai quelque chose d’autre. C’est le moment où a vraiment commencé le Champ freudien tel qu’on l’a connu depuis, c’est-à-dire comme un ensemble lacanien autonome, réunissant des groupes de plus en plus nombreux à travers le monde, ne devant rien aux médias, au soutien de personne, et qui a donné finalement plusieurs Écoles. Donc, de la même façon que Koutousov avait bénéficié de la profondeur de l’espace russe, j’ai compté sur la profondeur du temps ! Il fallait ne pas se laisser fasciner par l’instant, mais calculer sur le long ou le moyen terme, maintenir le lacanisme sans la présence de Lacan, donc le réinventer à l’usage de ceux qui n’avaient pas connu Lacan en personne, revenir à la clinique, promouvoir une formation, perfectionner la nôtre. On verrait bien si un jour les dieux ouvriraient une trouée. Après dix ans, en janvier 1992, j’ai été en mesure de fonder une association internationale, l’association mondiale de psychanalyse (AMP). Elle représente un peu moins de dix pour cent de l’IPA, mais elle est compacte, tandis que l’IPA, beaucoup plus étendue, est aussi plus hétérogène, ce qui, d’une part, fait sa force, mais qui fait aussi qu’elle connaît des contradictions internes plus fortes. Par ailleurs, les groupes lacaniens, les analystes indépendants, se sont multipliés. Elle a dû renoncer à son rêve de monopole.
Le centenaire
« Je m’étais toujours dit que je reconsidérerais ma position lors du centenaire de Lacan. Après sa disparition, j’avais décidé de ne rien faire pour l’historiciser, faire de lui un personnage historique, un grand homme du temps passé. Donc, pas de publications d’archives ou de manuscrits, pas de Cahiers Jacques Lacan, continuer les Séminaires exactement comme de son vivant, rien qui marque qu’il n’était plus là. On peut déchiffrer ça comme une volonté d’éterniser le père, pourquoi pas, mais je ne vois pas du tout les choses comme ça. Historiciser Lacan aussitôt après sa mort, c’était à mes yeux une défense, le désir de tourner la page sur un enseignement qui gardait pourtant toute son actualité, qui commençait seulement à être déchiffré, et recélait d’extraordinaires virtualités. Lacan était un précurseur, et j’étais persuadé qu’il continuerait d’être lu au présent. C’est ce qui s’est passé. Depuis vingt ans, on lit les Séminaires de Lacan, et ses Ecrits, comme des textes d’aujourd’hui, ce qui est unique. Des propos tenus au milieu du XXe siècle ne sont pas du tout classés dans le registre du document historique, on les prend comme des contributions essentielles à la clinique d’aujourd’hui. L’édition est nue, brute de décoffrage. Maintenant, au terme de vingt ans, c’est gagné. Lacan est au centre du débat psychanalytique dans le monde : est-il bon, est-il méchant ? Comment peut-on être lacanien ? Qu’en faire ? etc. Dans un tel contexte, où la vivacité du lacanisme contemporain est démontrée, l’historisation changera maintenant de sens, elle aidera à la lacanisation de la psychanalyse. Il y a désormais des combats à mener, qui n’étaient pas d’actualité au temps de Lacan. Par exemple, les lobbies voudraient voir l’État réglementer en France, comme c’est le cas en Italie, la pratique des psychothérapies, reconnaître des diplômes, alors que la psychothérapie n’a aucune unité, ce n’est pas une discipline, c’est un ensemble de pratiques les plus variées, qui sont supposées faire du bien aux gens quant au mental. C’est la nuit où tous les chats sont gris. La seule zone des pratiques de psychothérapie qui ait de la consistance c’est celle qui est liée à la psychanalyse, et qui consiste dans des pratiques réglées, modérées, de la parole, de l’interprétation, et du transfert. Pour le reste, la meilleure des psychothérapies, c’est encore la gymnastique ! Les deux pôles des psychothérapies, ce sont les techniques de la parole, dont le noyau dur est la psychanalyse, et les techniques du corps. Au milieu, vous avez tout et n’importe quoi. J’attends de voir qui va se présenter comme professeur de psychothérapie. Si l’on veut parler de la protection du public, eh bien, parlons-en. Il est de l’intérêt du public que les pouvoirs publics ne s’engagent pas dans cette voie. Ce serait à mon avis irraisonné, infondé, et inquiétant. »
« La » psychanalyse
« D’abord, y a-t-il la psychanalyse ? Il y a un champ qui a été ouvert par Freud, et qui consiste à mettre le sujet dans la position dite d’association libre. Dîtes ce que vous voulez, ce qui vous passe par la tête, ce que vous n’oseriez jamais dire ailleurs, laissez venir. Position inédite, subversive, qui a passionné, y compris les artistes. Ce champ est aujourd’hui exploité de plusieurs façons différentes. Poser un standard de durée, ou penser que cette contrainte n’a pas de raison d’être, qu’elle est même contraire à la nature de l’inconscient, faut-il en faire une guerre de religion ? L’époque me semble davantage portée à voir ici la querelle du Gros Bout et du Petit Bout dans Swift ! Tout indique qu’il y a des façons différentes, mais affines, d’aborder le même continent. D’autant que la plupart des sociétés sont elles-mêmes fragmentées, et qu’il y a des voies individuelles, originales. Si j’ai multiplié dans mes Lettres les marques de mon histoire personnelle, c’est aussi pour le démontrer en acte : voilà d’où je viens, voilà ma façon d’attraper les choses, ou d’être attrapé par la psychanalyse. Je comprends très bien que des gens aient été révulsés par Lacan. Lacan avait un côté Prince de la Renaissance, un côté flamboyant, ostentatoire, lorsqu’il était content de vous voir il le manifestait, n’hésitait pas à donner de la voix, il pouvait être au milieu d’un hall de théâtre, au milieu d’un restaurant, le souci du bien-être des spectateurs ou des dîneurs ne l’arrêtait pas. Lacan était à l’opposé du style petit bourgeois, qui était alors de mise dans l’Université. J’en étais enchanté, alors que sa manière n’était pas la mienne, mais la liberté qu’il démontrait avec les convenances libérait quelque chose chez chacun, on voyait en quelque sorte que chacun avait droit à son originalité, à être ce qu’il était. Il disait : « Faites comme moi, ne m’imitez pas. » Cela me paraît la leçon de Lacan. Justement parce qu’il se sentait avoir en charge le discours de la psychanalyse, il faisait tout pour déjouer le conformisme. Nous sommes en train d’entrer dans le troisième demi-siècle de la psychanalyse. Les cinquante premières années ont été dominées par Freud, cela s’est prolongé au-delà de sa mort, jusqu’au discours de Rome de Lacan en 1953. Après, ce sont les années Lacan, qui ont duré jusqu’à vingt ans après sa mort. Elles ont été marquées par son inventivité théorique, vraiment unique. Du point de vue institutionnel, cela a été la polémique, la haine, les scissions. On entre maintenant dans le troisième demi-siècle. Cette vieille discipline pour survivre devra se réinventer. Ses praticiens devront changer d’allure. La psychanalyse, les pratiques d’écoute qu’elle inspire, pour le meilleur et pour le pire, sont désormais un fait de société. Les arguments d’autorité ne sont plus validés par le public. Les airs compassés font rire, les complications gratuites paraissent grotesques, les ignorances n’arrivent même plus à se masquer. La pression du public devrait à terme forcer les analystes à renoncer au conformisme, à se supporter davantage, et à faire front ensemble. Bien sûr, ils vont traîner les pieds, continueront de se disputer, mais un processus nouveau a commencé. »
D’un discours public inspiré de la psychanalyse
« En analyse, vous entendez maintenant des personnes qui ne sont absolument pas des racistes qui vous font part de pensées qui leur viennent involontairement lorsqu’une personne basanée qui paraît arabe est là et s’approche d’elles. On a eu il y a un ou deux ans des manifestations antisémites dans les banlieues comme on n’en avait pas connu depuis la seconde guerre mondiale. Ce sont des phénomènes qui vérifient ce que Lacan avait prophétisé, à ma surprise, quand je l’avais interviewé dans Télévision en 1973 : que le racisme avait de l’avenir, en raison même de ce que l’on n’appelait pas encore la mondialisation. Les différences deviennent insupportables quand elles sont précipitées dans un espace unique. Il faudrait exercer une « thérapeutique de masse » , faire entendre un discours public qui offre au moins une autre perspective que celle qui conduit à la haine inexpiable de l’Autre. Le principe du racisme est simple : c’est que l’Autre jouit d’une autre façon, l’Autre jouit toujours d’une autre façon. Cela a été à la racine de la dévalorisation des femmes, de ce que l’on peut bien appeler un racisme anti-féminin. Cela menace maintenant d’opposer des civilisations, c’est-à-dire des modes de jouir traditionnels : on ne jouit pas de la même façon d’être soi, d’avoir un rapport à Dieu, au corps, etc. Des discours publics inspirés de la psychanalyse pourraient contribuer à empêcher ces folies de cristalliser. Si un certain nombre de discours produisent des identifications conduisant au meurtre de l’Autre, il n’y a aucune raison qu’il ne puisse pas y en avoir d’autres qui aident à empêcher ces identifications de prendre, qui aient un effet dissolvant sur elles. Cela peut passer par l’ironie, par la satire, par la métonymie, entre les mots. Tout de même, c’est ce que les philosophes du XVIIIe ont accompli. Évidemment, leur réussite a été payée d’un retour de nouveaux maîtres terribles, mais ils ont réussi en leur temps à entraver l’action des absolutistes, qui se sont trouvé petit à petit garrottés. Ce sont les Lilliputiens qui ont attaché au sol le Gulliver absolutiste, ces petits philosophes avec leurs petites plaisanteries. Au moins cela fait-il rêver. »
Les USA
« Ce qui me soucie, c’est que nous n’avons pas en France de communication avec “l’opinion éclairée” américaine. Or, elle existe, elle est puissante, elle est sur la ligne de front face à une opinion obscurantiste, constituée, richissime, la plus forte du monde, dont on n’a même pas idée en France. Un sentiment anti-américain très sommaire, encore si répandu en France, empêche la connexion qui serait si utile avec cette opinion éclairée américaine. Il faudrait tisser des liens avec elle. Il y a un anti-américanisme légitime contre les forces obscurantistes et brutales, et un anti-américanisme ridicule qu’il faut surmonter pour se lier à l’opinion éclairée américaine qui, elle, est passionnante, courageuse. Il y a eu aux USA une époque dorée pour la psychanalyse, apportée par les immigrés après la venue au pouvoir du nazisme. La psychanalyse a été adaptée aux valeurs américaines, Freud a été présenté comme un saint de vitrail, et tout ça a fait son temps. À partir du moment où l’on adopte des critères extérieurs à l’opération analytique - rapidité, efficacité immédiate, rentabilité -, il vaut mieux prendre une pastille qui vous soulagera dans l’heure que d’envisager un traitement long et aléatoire. L’analyse suppose que l’on fasse sa place à la recherche de la vérité, pour parler comme Malebranche, ou au désir de savoir, même s’il est illusoire ; il faut en tout cas que vérité et savoir soient des valeurs investies, procurent une satisfaction. Ce qui a fait le succès de la psychanalyse, c’est-à-dire l’adaptation aux valeurs américaines, fait maintenant sa décadence. Le symptôme psychiatrique est constitué dans l’objectivité, tandis que le symptôme analytique, lui, est purement subjectif, et sa guérison est subjective aussi. Donc, vous n’avez pas d’autre matière que la déclaration du patient. C’est ce qui est très difficile à accepter quand vous définissez la rationalité du réel par la quantité. Il y a un réel propre à la psychanalyse qui répond à d’autres critères, qui inclut le sujet. Aux USA il y a certainement bien des gens qui auraient l’usage d’une psychanalyse d’inspiration lacanienne, encore faudrait-il pouvoir la leur apporter, ce n’est pas le cas pour l’instant. »
Le style des lettres à l’ « opinion éclairée »
« Là, on touche à quelque chose qu’il ne m’est pas facile de commenter. Cela m’est venu comme ça. C’est un style marqué en effet d’une certaine emphase, d’une déclamation. J’ai beaucoup aimé être élève de 6ème, 5ème, 4ème au lycée Charlemagne, j’y ai lu avec délectation, en même temps qu’un nombre considérable d’illustrés, tout Molière, tout Corneille, tout Racine, les classiques, et en les aimant, pas du tout par obligation scolaire. C’est pour moi la langue française. À côté de contributions savantes fatalement plus jargonnantes, je crois avoir écrit dans la langue commune beaucoup de choses au cours des guerres civiles que nous avons eues dans le milieu analytique. On ne s’en est pas trop aperçu, ni moi-même, parce qu’on était occupés par la bagarre. À partir du moment où je me suis tourné vers cette opinion à créer, le jargon a disparu, que j’utilisais comme tout un chacun quand je m’adressais à mes collègues. Il est normal que les psychanalystes aient entre eux un langage de techniciens, qui permet d’abréger. L’effet-jargon se produit quand on introduit dans un dicours de spécialistes le public, pour l’impressionner. Dans mes Lettres, je m’adresse à un public à qui je ne suppose pas la connaissance des termes techniques, mais de la bonne volonté. Il n’y en a pas toujours. Une personne de ma famille, quand je suis allé lui lire la seconde lettre, la “Lettre claire comme le jour”, m’a dit : “Je préférais la première, celle-ci n’est pas claire du tout.” Une autre a dit : “Non, ce n’est pas obscur, c’est du Lagarde et Michard !” (Rires). C’est vrai, j’ai gardé ma culture de lycéen. »
La réunification
« Tout en protestant vivement contre des abus, je crois tenir sur le fond un discours mesuré, qui bouscule sans doute quelques idées reçues, et une ou deux personnes, lesquelles ont dit : “Oh la la, il pète les plombs !” Le sens qu’il faut donner à cette formule, c’est : ne répondons pas, faisons les autruches, mettons-nous aux abonnés absents. Mais quand les projecteurs sont allumés, le mutisme est une position marquée. Il ne suffit pas de se taire pour être hors d’atteinte. En fait, on m’a laissé structurer le début de partie. Or, je ne veux pas du tout que les autres perdent la partie, je veux qu’ils la gagnent avec nous. Les voix qui dans la psychanalyse mondiale réclament aujourd’hui l’élaboration d’une nouvelle tolérance, l’écoute entre analystes, un degré de solidarité, sont celles d’Horacio Etchegoyen, la mienne, plusieurs autres. Certains occupent la place de la réticence, de la méfiance, regardent en arrière. Prendre quelques risques me paraît plus prudent. »
Notes
[1] Une morale du minoritaire. Variations sur un thème de Jean Genet, Fayard, 2001