Vacarme 13
automne 2000
À nos lectrices et lecteurs
Ce numéro, Vacarme 13 (automne 2000), est désormais archivé et tous ses articles sont accessibles dans leur intégralité. Vacarme aime la gratuité, mais une revue existe grâce à ces abonné·es.
chroniques
fécondation
par François Rosset
Ce samedi, habillé pour sortir, caressant une dernière fois du bout de l’index la pointe de mon menton, je n’ai pas vu bondir le mongrelat lorsqu’il s’est précipité sur mon genou gauche et l’a serré entre ses pinces, immobilisant mon tibia et ma cuisse, m’empêchant du même coup de quitter le miroir devant lequel je m’attardais. Un pan de mon frac couvrait sa tête visqueuse ; de ce faciès je n’aperçus que la coulée d’une lippe exprimant la déception, ainsi qu’une volonté en tout point adverse (…) Lire →
scènes de la vie contemporaine
par Pascalle Monnier
Enfance dans une ville de province - Départ pour Paris à l’adolescence - Les habitudes contractées à cette occasion et l’apparition de certains traits de caractère - Épisode dans un pays étranger - La manie des huîtres - Projet de roman avorté - Amitiés et influences intellectuelles - La lecture des Mémoires d’outre-tombe - Les choix politiques
Enfance & adolescence
Il eut une enfance provinciale entre une mère fine, pleine de fantaisie, mais que ses mariages successifs et (…)
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à même les chouaris vides
par Didier Doumergue
En mille neuf cent quatre-vingt quinze je suis mort. Trois fragments pour tenter de me décrire regardant une photo de moi durant la guerre d’Algérie. Mes parents m’avaient offert une panoplie de chevalier. Je ne l’ai plus ni la photo.
- Or ça qui êtes-vous paladin, entre la ventaille et la mentonnière, quel visage distinguer ? C’est que je n’existe pas. Et comment vous acquittez-vous de vos charges, vu que vous n’y êtes pas ? À force de volonté et de foi en la volatilité de notre cause. - (…)
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« montre-moi si vraiment du ciel tu es l’élu »
par Fred Poulet
Tu préfères le foot. Ce soir derniers matches de poules. Duplex à dix-huit heures. Revenir sur l’expression "match de poule". Passer chercher Z. à seize heures quarante cinq. Gros enjeu dans le groupe C. La Norvège, fascinante avec son projet de football en base 1 : un attaquant, dix défenseurs-défendre, dégager, marquer. Tu préfères le foot. Impasse sur la deuxième mi-temps. Un peu en retard pour le cinéma expérimental. Cinq stations, un changement. Embrasser Z. Je t’aime /Je t’aime. Vous (…) Lire →
joker
par Franck Laurent
Sur le mur de schiste rouge La lumière a retrouvé Quelque chose du feu. Froide encore, cependant. * On était revenu près des visages On avait regardé de près On avait défilé Et l’on n’avait pas su dans le noir éclairé de la ville Approcher vraiment, jusqu’à Et tout reste à distance, étrangement. Lire →
Fritz & Otto
par Pierre Alferi
Dans la filière du parlant il n’y a plus que deux admissibles à notre concours de mise en scène. Ils viennent de Vienne. Nos critères étaient surhumains. Le candidat devait exceller : 1. dans le placement de la caméra - habileté des mouvements en figures imposées, innovations en figures libres -, 2. dans la dramaturgie - refonte de scénarios, direction d’acteurs, maîtrise du plan, découpage -, 3. dans les arts plastiques du plateau - cadrage, usage des décors et de la lumière - avec une (…) Lire →
le moineau de la bibliothèque / passer bibliotheca
par Ariane Chottin-Burger
Je devais balayer l’espace du regard sans même le savoir lorsqu’il est entré dans mon champ de vision. La surprise de sa présence a déclenché dans mon œil l’ouverture d’un œil plus vif. Posé sur le sol, debout, immobile, le moineau était là. Bibliothèque presque vide. Tables nues sous les lampes vertes encore éteintes, chaises rapprochées des bords. Cylindres noirs porte-parapluie, rangés à chaque extrémité. Ordinateurs le long du mur. Les branches du grand acacia, des deux eucalyptus et (…) Lire →
scène du dieu
par Frédérique Ildefonse
Vous avez déjà été attaché à une charrette. Vous avancez. Membres attachés, membres serrés contre le bois, les planches scient la peau ou la colorent, pour commencer. Les cheveux glissent sur les yeux et la bouche, les ramener vous oblige - à donner des coups de tête en l’air
douleur immédiate des bras, des jambes ; une seconde où vous voyez clairement. Vous le payez de cette tension des chaînes, le corps - une seconde, tête retombe, yeux clos, cheveux
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cris figés par l’ombre (extraits)
par Eric Vuillard
Une trigonométrie pernicieuse a dévasté ma figure, a détourné mon tonus à des fins fanatiquement abstraites. Aucune introspection n’est plus possible. Mes idées viennent en réalité du dehors. Elles me tournent autour. On dirait un essaim de mouches cherchant à se poser sur une bête malade, cherchant la plaie par où pénétrer.
*
Monde fermé. L’orage couve. Le rapprochement des sexes laisse silencieux (sans être encore démontré). L’emplacement est des plus mauvais : lit de cailloux, lieu de (…)
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